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https://ruedepleinelune.com/2020/02/14/questions-reponses-teinture-naturelle/C’est quoi, la teinture naturelle ?
14 février 2020
Tombée dans l’oubli pendant des décennies, il y a encore quelques années seulement, la teinture naturelle réapparaît sur le devant de la scène !
Vous avez certainement entendu parler de ces teintures à la télé, au détour d’un article ou dans les descriptions de mes trousses.
Aujourd’hui, j’ai décidé de répondre aux questions que j’entends fréquemment en salons ou expositions.
Avec cet article, vous saurez tout (ou presque) sur les teintures naturelles !
Qu'est-ce que la teinture naturelle ?
Il s’agit de colorer des textiles au moyen de produits naturels solubles dans l’eau, dixit Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Teinture_naturelleFeuilles, fleurs, racines, écorces sont à la base des teintures végétales. Et parfois même, des insectes (telles les cochenilles qui donnent un rose ou rouge carmin) sont traditionnellement utilisés.
Et oui ! Je dis traditionnellement utilisés, parce que les teintures végétales sont tout simplement le moyen qu’avaient nos ancêtres, pas si lointains, de colorer leurs vêtements avant l’ère des teintures chimiques.
Dans le Nord de la France où je vis, les vêtements étaient majoritairement dans des teintes de beige, marrons, gris taupe ou kakis, tout simplement parce que c’est ce que donnaient les végétaux de la région !
Les personnes plus aisées pouvaient être parées de rouges, violets ou bleus parce qu’ils avaient les moyens de faire venir les colorants issus de garance, de bois de campêche ou d’indigo qui poussent dans le sud de l’Europe ou dans des contrées encore plus lointaines.
Alors, c'est écologique puisque c'est naturel ?
Et bien, malheureusement pas tout à fait.
C’est naturel, certes puisque on utilise des matériaux naturels.
C’est, certes, plus écologique que les teintures chimiques, ravageuses pour l’environnement.
Mais le problème, c’est que cela nécessite beaucoup d’eau.
Beaucoup beaucoup d’eau.
Lavage, décoction, imprégnation, rinçage, rinçage et encore rinçages…
Et nul n’est sans savoir que l’eau est précieuse (de plus en plus…)
Des solutions ?
Avant : récupérer l’eau de la douche.
Après : arroser ses plantes.
Deuxième point sur lequel être vigilant : les ingrédients.
Il faut faire attention à ce qu’on utilise : les solutions pour préparer les fibres à teindre ou nuancer les couleurs.
Il était fréquent d’ajouter de l’étain pour faire virer les couleurs par exemple.
On entend parler de teintures à l’avocat : attention à leur provenance …
D’une façon générale, si je tremble à l’idée de vider l’eau usagée sur la plante préférée de mon jardin, je m’abstiens !
Et enfin, dernier point d’attention : l’énergie.
Chauffer son bain de teinture accélère la coloration. Mais à part les méthodes qui utilisent le soleil (et difficilement utilisable par ici…) la production d’énergie n’est jamais tout à fait écologique.
A nous, d’être responsables et pas forcément trop pressés !
On peut donc conclure que, à petites doses, en étant vigilants sur la composition des produits ou la provenance des plantes, la teinture naturelle est plutôt… naturelle !
Et d’ailleurs, vive les restes de cuisine !
Avocats bio, pelures d’oignons, fanes de carottes: il y a de quoi faire.
On ne peut pas avoir toutes les couleurs ?
Techniquement, si.
Cela dépendra surtout si vous souhaitez importer des plantes colorantes (celles que j’ai évoquées tantôt : garance, cachou, etc) ou si vous préférez utiliser des plantes régionales: brou de noix, écorce de bouleau, ronces, achillée mille-feuille, etc, etc.
Le jardin de Couleur Garance dans le Luberon regroupe pas moins de 250 espèces de plantes tinctoriales.
A visiter si vous passez par là !
https://couleur-garance.com/Et attention !
Des plantes qui tâchent comme la betterave ou les baies ne sont pas forcément de bonnes colorantes.
On en reparle après…
A noter : – La technique d’extraction du colorant de l’indigo ou du pastel pour avoir de beaux bleus est très particulière.
– Le seul moyen d’avoir du vert vert est de sur-teindre en bleu un tissu que l’on a teint en jaune avant (ou inversement).
Le vrai vert est étonnamment la couleur la plus compliquée à obtenir avec des pigments végétaux.
Je crois qu'on ne peut avoir que des teintes très douces avec la teinture naturelle...
Et bien non !
La force de la couleur obtenue dépend de plusieurs facteurs.
La fibre teinte
En ce qui concerne les textiles, on distingue deux sortes de fibres :
– les fibres animales comme la laine ou la soie
– les fibres végétales telles que le coton, lin ou chanvre.
Ces familles de fibres ne réagissent pas de la même façon face aux colorants .
A dose égale de plantes tinctoriales, on obtient des couleurs plus intenses sur les fibres animales.
La quantité de plantes
Tout simplement.
Plus notre bain colorant sera chargé en plantes, plus la couleur sera intense.
Certaines solutions (comme la décoction de cochenille) ont un pouvoir colorant plus fort que d’autres.
Le nombre de bains
Pour teindre on prépare un bain de teinture : souvent une décoction avec les plantes tinctoriales.
On l’utilise une première fois : ce premier bain est très concentré et colore intensément la fibre plongée dedans.
On l’utilise ensuite plusieurs fois (on parle de 2e et 3e bains) jusqu’au bain d’épuisement.
La coloration des fibres sera de plus en plus claire.
Par contre, la couleur ne tient pas à la lumière ou aux lavages, si ?
La réponse est: si ! Les couleurs tiendront aux lavages et à la lumière.
De la même façon qu’un tissu teint chimiquement, il faut juste éviter de le laisser accroché à une fenêtre H24 ou de le laver à 60° tous les 3 jours…
L’étape clé pour que les couleurs résistent dans le temps est le mordançage.
C’est la préparation des fibres pour qu’elles fixent bien les colorants: c’est une étape INDISPENSABLE !
Plusieurs méthodes pour cela : je vous en reparle dans un autre article ???
Second point important : les plantes.
Je vous disais que toutes n’ont pas le même pouvoir colorant et de la même façon, les couleurs obtenues ne résisteront pas toutes de la même façon aux lavages ou à la lumière.
Ainsi, les baies, myrtilles et compagnie, ou le curcuma ne tiendront pas à la lumière : leurs beaux violets et jaunes deviendront gris (c’est bien aussi).
Ce sont des plantes petit-teint.
A l’inverse, il y a des plantes grand-teint très solides à la lumière et aux lavages qui étaient évidemment très prisées dans les temps anciens : garance, indigo ou encore gaude.
On ne peut teindre que de façon unie en teinture naturelle ?
Teindre de façon unie et uniforme est le plus compliqué !
Un peu de pratique et quelques trucs sont nécessaires pour ne plus avoir de vilaines traces.
L’effet nuancé est un des charmes de la teinture naturelle.
Il y a de multiples techniques venant du monde entier pour obtenir des motifs avec la teinture naturelle : réserves à la cire, tampons, sérigraphie, shibori.
J’aime particulièrement utiliser la technique japonaise du shibori : créer des réserves dans le tissu avec des jeux de pliage
Pourquoi ne pas ajouter de vinaigre ?
Et oui, vous avez peut-être lu cela sur les étiquettes ou fiches de mes produits : “Ne pas ajouter de vinaigre !”
Je le précise parce que certains utilisent du vinaigre en tant qu’adoucissant mais que le vinaigre risque de faire virer les couleurs.
Varier le PH (vinaigre = acide) est une des façons de nuancer les couleurs obtenues par teintures naturelles.
Il en existe d’autres mais je vous en reparlerai bientôt !
Voilà pour cette foire aux questions !
J’espère que vous n’aurez plus peur d’acheter des trousses, sacs ou boucles d’oreilles teints naturellement !
(D’ailleurs, la boutique c’est par ICI …
https://ruedepleinelune.com/categorie-produit/accessoires-textiles/et même les kits broderie se mettent à la teinture.)
https://ruedepleinelune.com/boutiquegenerale/product-category/sample-product/kit-broderie-rose-echevelee/Et si vous voulez en savoir encore plus, je vous donne rendez-vous bientôt pour un nouvel article !
(Et pour vous abonner et ne pas le manquer, c’est tout en bas avec l’inscription à la newsletter.)
Ou pourquoi pas lors d’un atelier d’initiation au printemps ou en été?
https://ruedepleinelune.com/atelier/Plusieurs photos de cet article ont d’ailleurs été prises lors des stages de l’été 2019 et j’en profite pour embrasser les participantes !
Je suis curieuse de savoir ce que vous avez pensé de cet article !
Avez-vous encore des questions???
Bonne journée, soirée ou nuit
et à très bientôt ici ou sur les réseaux!
Mélissa
Allez je me lance en teinture naturelle
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https://ruedepleinelune.com/2020/02/29/debuter-en-teinture-naturelle/Je vous offre aujourd’hui un article technique !
Le matériel et les différentes étapes n’auront plus de secret pour vous.
De quoi a-t-on besoin pour teindre naturellement ?
Le matériel
Commencer la teinture naturelle ne nécessite pas un grand investissement financier.
Il vous faudra rassembler un peu de matériel que vous pourrez facilement récupérer à droite à gauche, en brocante ou chez Emmaüs.
De façon générale, il faudra vous méfier de tout ce qui est en métal et en particulier de ce qui est en cuivre ou en fer. En effet, les sels métalliques sont utilisés en teinture naturelle pour nuancer les couleurs.
Les marmites
Idéalement en inox ou en alu, exclusivement réservées à l’activité de teinture, elles doivent être assez grandes pour que votre linge à teindre puisse circuler librement.
J’utilise beaucoup les stérilisateurs qui ont plusieurs avantages : leur taille et le contrôle possible de la température du bain.
Attention cependant, tout comme avec les marmites émaillées : l’émaillage doit être en parfait état. L’émaillage recouvre en effet du fer qui, s’il est découvert, aura une influence sur la couleur obtenue.
De la même façon, vous pouvez utiliser des marmites en cuivre mais en tenant compte de l’influence du cuivre sur la couleur.
Divers récipients
Utilisés pour réaliser les bains de teinture ou les nuançages, ils seront en verre ou plastique.
Il vous faudra également pour ces étapes une balance : une balance de cuisine assez précise fera très bien l’affaire !
Des filtres
Une passoire en plastique et de vieux collants (non filés) vous seront utiles.
Pour mélanger
Pour touiller comme on dit par chez moi, je vous conseille des cuillères et pinces en bois.
Des gants et un tablier ou de vieux vêtements peuvent être utiles !
Les fibres
Que vous souhaitiez teindre du fil ou du linge, il faudra que la fibre soit naturelle : coton, lin, chanvre, soie, laine…
Il n’est pas nécessaire que la fibre soit blanche ou écrue pour la teindre, mais la nuance de base du tissu influencera la nuance de couleur obtenue. Une teinture sur un lin beige donnera une nuance plus foncée que sur un coton blanc.
Il est également possible de surteindre un tissu, déjà coloré donc.
Mon dernier bain de garance étant trop rose, pas assez chaud à mon goût, j’ai replongé plusieurs tissu dans un bain d’aulne qui donne une couleur beige chaud.
Les ingrédients
Les plantes tinctoriales
Comme je l’expliquais dans mon article précédent, il existe une grande variété de plantes tinctoriales.
Vous pouvez:
récolter vos restes de cuisine : peau et noyaux d’avocat, pelures d’oignons, fânes de carottes),
glaner dans votre jardin ou au bord des becques (ou fossés pour le reste de la France) : cônes d’Aulne glutineux, orties, jeunes ronces, feuilles de bouleau, Millepertuis, Eucalyptus…
faire vos courses sur internet !
N’hésitez pas à visiter les boutiques de couleur garance
https://couleur-garance.com/et d’ Alysse creation
http://alysse-creations.info/laine-et-tricot/teinture-vegetale.htmlLes autres ingrédients
Il vous faudra quelques ingrédients supplémentaires, que je détaillerai plus bas, pour mordancer ou nuancer vos fibres :
– des graines ou du lait de soja dans tout bon magasin bio
– des vieux clous et du vinaigre
– du bicarbonate de soude
– des cendres
– de l’alun ou autres mordants …
La plupart se trouve facilement et le reste est disponible sur les boutiques en ligne citées ci-dessus !
Les étapes de la teinture naturelle
1. Décatir
Pour préparer vos fibres, il est préférable de les décatir, surtout si elles sont neuves !
Il s’agit d’enlever l’apprêt présent sur le tissu après le tissage ou la graisse de votre laine.
Rien de compliqué, il suffit de les laver au savon de marseille par exemple. Pas besoin de monter la température : laisser tremper suffit généralement.
Pour le lin, j’ajoute un peu de bicarbonate de soude.
2. Mordancer
L’étape clé de la teinture naturelle !
Indispensable pour que vos couleurs résistent au temps, le mordançage est l’étape de préparation des fibres à recevoir la teinture.
Mordançage des fibres animales
Pour mordancer la laine ou la soie, une recette :
10 à 20% d’alun et 6% de crème de tartre.
Les pourcentages se basent sur le poids des fibres à mordancer sèches.
Mordançage des fibres végétales
Pour mordancer le coton, le chanvre ou le lin, plus résistants à la teinture que les fibres animales, plusieurs recettes existent. Certains teinturiers ne jurent que par telle ou telle recette, telle que l’acétate alunage que je trouve, personnellement, particulièrement complexe et peu convaincante.
Après plusieurs tests, j’en privilégie deux : une plus simple et une plus efficace avec certains colorants.
Le lait de soja
Les protéines du lait de soja permettent de préparer les fibres à la teinture naturelle.
Il vous suffit de diluer du lait de soja (que vous pouvez préparer facilement avec des graines de soja jaune !) et d’immerger vos tissus. Il faut bien malaxer et laisser reposer une demi-heure environ. Puis essorer et laisser sécher. Vous pouvez recommencer l’opération 2,3 fois.
Simplissime non?
Les tanins
La seconde méthode que j’utilise est celle qui combine l’alunage (utilisation de l’alun comme pour les fibres animales) et un bain de plantes riches en tanins (noix de galle ou poudre de tara).
Faire un premier bain à 20% d’alun.
Faire un deuxième bain avec des tanins (par exemple 10% de poudre de tara).
Enfin replonger dans le bain d’alun.
“Faire un bain” signifie: diluer avec de l’eau déminéralisée si possible (eau de pluie ou ajoût de vinaigre dans l’eau calcaire), plonger le linge humidifié et chauffer pendant 1 heure environ, puis essorer et sécher.
Cette méthode montre de meilleurs résultats avec certaines plantes comme la garance par exemple.
3. Préparer le bain de teinture
Il s’agit de récupérer le maximum de colorant contenu dans nos plantes.
Le principe est simple :
1. réduire en petits morceaux (hacher les plantes, broyer les écorces ou noyaux…)
2. réaliser une décoction : ajouter de l’eau et chauffer pendant une demi_heure environ. Il est possible de recommencer cette opération plusieurs fois.
3. laisser infuser. Plus les plantes infusent, plus elles délivreront leurs principes colorants. De façon générale, les écorces ou parties dures devront infuser plusieurs jours.
4. filtrer. Indispensable pour ne pas avoir de petites taches sur les tissus.
4. Teindre !!!
Vous pouvez maintenant transférer votre bain colorant dans votre marmite et ajouter autant d’eau qu’il le faudra pour que votre linge soit émergé et puisse nager librement.
Humidifiez vos fibres avant de les immerger lentement une à une (faites plusieurs allers-retours)
Vous pouvez laisser chauffer une heure environ en remuant régulièrement. Vous pouvez ensuite laisser votre tissu reposer dans ce bain plusieurs heures : la couleur n’en sera que plus solide.
C’est à cette étape que vous pouvez faire des dégradés ! N’immergez qu’une partie de votre tissu, puis un peu plus, puis un peu plus, puis entièrement.
Attention ! Si vous teignez de la laine, commencez votre teinture à froid et ne chauffez pas trop fort pour ne pas la feutrer ! De la même façon, laissez refroidir le bain avant de la sortir.
N’hésitez pas à utiliser votre bain plusieurs fois, juqu’à épuisement. Les couleurs obtenues dans le premier bain de teinture seront plus soutenues que dans les bains suivants.
Nuancer
Vous pouvez maintenant nuancer votre couleur avec un bain de nuançage : sulfate de fer, acétate de fer, cuivre, vinaigre ou cendres.
Ci-dessous, j’ai nuancé au sulfate de fer du linge ancien teint à l’aulne et obtenu un beau gris chaud !
5. Rincer et sécher
Il ne vous reste plus qu’à sortir vos fibres du bain de teinture ou de nuançage et à rincer, rincer, rincer, rincer et rincer !
Vous pourrez ensuite procéder au séchage.
Deux règles : jamais en plein soleil et attention aux plis (deux pinces à linge dans chaque coin est l’idéal)
J’attends ensuite plusieurs jours avant de relaver mes fibres et de les utiliser.
Voilà ! Vous savez tout ! Vous pouvez maintenant débuter en teinture naturelle !
Ce n’est pas très compliqué comme vous le voyez mais un peu (beaucoup?) chronophage. Ce long processus est nécessaire pour obtenir ces couleurs incomparables, changeantes avec la lumière et un peu écolos.
Prendre le temps pour produire mieux !
Je vous donne rendez-vous très bientôt pour une revue de presse et de net spécial teinture naturelle !
Si vous souhaitez être accompagnés et connaître les gestes et petits trucs qui vous permettront de réussir à coup sûr votre teinture n’hésitez pas à réserver un stage d’initation !
https://ruedepleinelune.com/nord-teinture-naturelle/J’ai répondu dans cet article à plusieurs questions qui m’ont été posées sur les réseaux sociaux suite à la publication du premier article : n’hésitez pas à me soumettre vos autres interrogations !
https://ruedepleinelune.com/2020/02/14/questions-reponses-teinture-naturelle/Un grand merci pour vos réactions !
A bientôt !
Mélissa